Clark, Kal ou Sup' ?

Publié le par helel ben sahar

Dans Kill Bill vol. 2, Tarantino plaçait dans la bouche de Bill une assertion au sujet de Superman. Selon le réalisateur, le super héro n’existe que dans la confrontation de lui-même (humain) et de son avatar (surhumain), dans la découverte de ses pouvoirs nouvellement acquis. En somme, le mythe du surhomme se définit dans l’enseignement et l’apprentissage qui précèdent l’utilisation des capacités extraordinaires. Sa diatribe concerne tous les personnages, de Spider-man à Daredevil, en passant par les X men. Les 4 fantastics entrent dans un schéma différent dans la mesure où il ne possède pas d’avatar, puisqu’ils agissent sous leur propre identité. Bill fait toutefois une réelle et notable exception pour Superman. Parce que Sup’ n’a pas acquis ses pouvoirs, chez lui, ils sont innés. Cette distinction inverse dès lors les applications de Bill concernant le rapport à la mythologie nouvellement créée.

Depuis son arrivée sur terre, Kal-el a du se « déguiser » en humain. Ainsi, Superman n’est pas l’avatar de Clark Kent, mais ce dernier est l’avatar de Kal-el (soit Superman, le Kryptonien aux super pouvoirs). Pourtant, en regardant d’un peu plus près la genèse du héro, on s’aperçoit que le schéma est effectivement différent de celui d’un Spider-man, mais qu’il s’inscrit dans une lignée similaire. La naissance du super héro commence avec la découverte de capacités hors du commun. Dans l’univers super héroïque, il n’existe pas de méta humain qui ait choisi de rester « ordinaire ». Tous ont emprunté la même route, seul le côté dans lequel ils se sont placé déterminera leurs actions futures. Si les pouvoirs chez Superman sont innés, il lui aura fallu néanmoins passer par une phase d’apprentissage pour lui permettre de les exercer. En cela, il n’est pas différent de Spider-man ou n’importe quel X man. Sup’ doit explorer ses nouvelles capacités, les contrôler dans le but d’une utilisation rigoureuse.

On pourrait débattre sur la notion d’innée et d’acquis pour le personnage. Cependant, allant à l’encontre de ses origines, c’est bien une éducation terrestre qu’il recevra. Parce que recueilli alors qu’il n’est encore qu’un bébé –  les référents Kryptoniens tarderont à apparaître – son enfance se déroule comme presque tous les enfants, dans une petite famille de fermiers au Kansas. Difficile alors d’imaginer Kal-el comme figure principale et Clark Kent comme avatar. Le déguisement est plus le truchement de l’identité que des origines, surtout lorsqu’elles n’affichent aucune distinction physique.

Avec le temps, peut-être que Clark Kent s’est progressivement effacé derrière Kal-el. En soit, c’est une possibilité, et dès lors, l’assertion de Bill (et Tarantino) trouve une part de vérité. Parce qu’il est trop tentant de réduire Clark Kent à un simulacre. Son existence respire la caricature ; la perception exagérée de la faiblesse. Une façon pour Sup’ d’organiser son opposé de la manière la plus évidente et pouvoir ainsi recourir à l’élément le plus infime pour masquer son identité : une paire de lunette.

Si les paroles de Tarantino n’ont rien des élucubrations d'un geek fou, elles n’en demeurent pas moins qu’une interprétation erronée ou sujette à contradiction. La distinction entre l’avatar et l’être est effectivement confuse chez Superman. On peut définir sa position selon des angles légèrement différents, sans toutefois annoncer aussi catégoriquement la réduction de Clark Kent à l’entité illusoire. Superman reste l’avatar, seulement la question de la personnalité initiale serait plutôt à recherche du côté du diptyque Kal-el / Clark Kent. Car dans cette opposition, s’exerce le réel choc des civilisations.

Publié dans Humeur

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